Le texte
argumentatif
Document proposé par Stéphane FONTAINE
<sd.fontaine@wanadoo.fr>
NB: les définitions des mots soulignés proviennent
du Lexique des
études littéraires.
Ses fonctions :
Tout texte argumentatif
défend une prise de position en s'opposant implicitement ou
explicitement à ceux qui pensent le contraire. Si le texte
n'est pas adressé à l'adversaire lui-même, il
vise à empêcher le lecteur de prendre cet adversaire
au sérieux. Si le texte est directement adressé
à l'adversaire, il vise à réduire l'autre au
silence, sans chercher à le convaincre. Il a donc 2
fonctions dominantes :
- Fonction persuasive : lorsque l'émetteur
cherche à convaincre le lecteur, à lui faire
partager son point de vue en faisant appel à ses sentiments
(persuader) ou à sa raison (convaincre).
- Fonction polémique
: lorsque l'objectif premier de l'émetteur
est de ridiculiser celui ou ceux avec lesquels il n'est pas
d'accord.
I. "Comment ça marche
?"
<blockquote>1. S'impliquer dans son
discours</blockquote>
Le principe de l'argumentation réside dans la conviction
de son auteur qui revendique la paternité des idées
exprimées, notamment à travers :
• le système d'énonciation
On recourt fréquemment à la 1ère personne,
indice de la présence du locuteur
dans la phrase et des propos tenus. Du fait de cette
présence forte de l'auteur, le texte argumentatif
relève du discours
(qui est à l'initiative du locuteur) et non du récit
(qui est à l'initiative du narrateur).
Le locuteur peut se manifester (utilisation de la 1ère
et 2ème personne et présences de marques de
jugement) ou pas (objectivité
apparente du texte informatif/explicatif ; utilisation de la
3ème personne et des phrases déclaratives) pour
masquer l'intention de convaincre Le présent intemporel est
le temps habituel du texte argumentatif,
puisque l'argument est valable de façon
générale.
• le choix du lexique comme
indicateur du degré de certitude :
- l'affirmation catégorique, certifiant qu'il n'y a pas
de doute possible. Sont alors employés des termes comme
"assurément", "sans aucun doute", "il est certain que",
"toujours", "jamais"...
- l'hésitation qui cherche ou semble chercher à ne
pas contraindre le lecteur. Sont alors employés des termes
comme "peut-être", "il est possible que",..
En argumentant, le locuteur
affirme sa certitude d'être dans le vrai ; il use
d'expression qui traduisent son assurance, sa confiance dans ses
idées comme "sans doute", "évidemment", "il est
indubitable que", etc.… La conviction d'avoir raison
s'affiche également dans les verbes d'obligation. Toutes
ces marques d'un jugement personnel sont appelées modalisations.
- l'utilisation d'un lexique affectif
par lequel le locuteur cherche à capter la sympathie ou
l'estime de son public et essaie de communiquer de lui l'image
morale la plus positive ou de présenter son dessein comme
particulièrement louable. Il utilise pour cela un réseau
de termes propres à manifester son émotion, sa
sincérité et son attachement à la thèse
exposée.
- les connotations qui
indiquent un jugement de valeur : connotations positives pour le
point de vue défendu ; négatives pour le point de
vue refusé.
<blockquote>2. S'adapter au destinataire</blockquote>
Le souci de l'effet à produire est très fort dans
le discours argumentatif,
puisque l'auteur cherche à convaincre, il doit
connaître son destinataire
et disposer son argumentation
en fonction de ce qu'il sait de son caractère. L'adaptation
calculée du langage à l'auditeur relève
parfois de la manipulation. C'est le cas lorsque les propos ne
sont adaptés aux attentes du destinataire
que pour tromper celui-ci.
• en préparant l'auditoire
Dans certains discours argumentatifs,
l'auteur commence par une entrée en matière
brève et percu tante, l'exorde,
propre à capter l'attention du destinataire
et à lui inspirer de la bienveillance. Souvent, ce type de
texte se conclut par une péroraison,
résumé des principaux arguments et appel aux
sentiments.
• en choisissant des arguments adaptés
Le choix de la méthode d'approche et celui des arguments
dépendra de l'esprit et des sentiments du destinataire
à convaincre. Pour plaire et raisonner en suscitant
l'intérêt du lecteur par l'exposition de la
pensée en cherchant des appuis incontestables en utilisant
:
- la métaphore.
Plus qu'un ornement, elle est un véritable outil de
persuasion qui transfère l'énoncé
abstrait dans un registre imagé et accepté du
lecteur, en rapprochant des faits qui ne résistent pas
toujours à l'analyse ;
- l'exemple qui introduit un
fragment de récit dans un
discours abstrait et aide
à la compréhension en fournissant une mise en
scène de l'idée et peut avoir valeur de preuve. Ils
ont pour fonction de soutenir une opinion, une
vérité d'ordre intellectuel de manière
concrète plus facile à saisir ; il appuie
l'argument logique comme une
illustration.
- le récit qui concourt
à l'agrément des propos en prêtant à
l'argument une
crédibilité supplémentaire en le montrant
à l'œuvre dans une histoire vivante dotée d'un
statut de réalité.
• en faisant découvrir la vérité
La meilleure façon de toucher le destinataire
de l'argumentation est de le faire participer à la
découverte de la vérité dont on veut le
convaincre. Cette méthode prend en compte l'amour-propre de
l'interlocuteur, amené à durcir ses positions
dès lors qu'on les récuse. Elle permet d'obtenir un
changement d'opinion de l'interlocuteur, mais en faisant mine de
lui en laisser l'initiative.
Il privilégiera une énonciation
qui évite la neutralité de l'expression ordinaire et
qui utilise un style oratoire
:
- l'anaphore
(répétition à intervalles réguliers
d'un terme ou d'une construction) qui provoque un leitmotiv
sémantique ou sonore
pour attirer l'attention sur une notion essentielle ;
- la période (phrase
longue et rythmée par des pauses secondaires) qui donne au
discours un rythme et une
ampleur qui traduisent le force de conviction du locuteur ;
- l'antithèse
(rapprochement de termes de sens opposés) qui indique la
tonalité polémique
au travers, souvent, de 2 champs
lexicaux opposés pour valoriser sa thèse
et celle qui discrédite pour renforcer l'opinion du
locuteur par effet de
contraste
- le temps des verbes typiques du discours, dépourvu de
valeurs temporelle.
<blockquote>3. Réfuter
l'adversaire</blockquote>
Vouloir persuader de la vérité de son discours,
c'est souvent du même coup contester le discours d'un autre
: le texte argumentatif
revêt alors la forme d'un affrontement de thèses.
Dans un texte argumentatif
à caractère littéraire, cet affrontement est
rarement une réfutation
au sens strict : l'auteur ne cherche pas à prouver la
fausseté de la thèse adverse (comme le ferait une
réfutation philosophique), il se contente de la
présenter sous le jour le plus défavorable, voire de
la ridiculiser (l'argumentation est polémique,
du grec polemos, la guerre). Plusieurs moyens sont à sa
disposition :
• l'énonciation à plusieurs
Deux voix se font entendre dans le texte à
caractère polémique,
celle de l'auteur et celle de l'adversaire. Vous devez observer
chaque fois comment la parole est concédée à
ce dernier, comment son
discours est rapporté afin de ne pas attribuer à
l'un la pensée de l'autre.
• une présentation partiale des thèses
en présence
La thèse de l'auteur
est exposée avec faveur à travers un réseau
lexical valorisant : épithètes louangeuses,
superlatifs, substantifs et verbes à connotations
positives. Le champ
lexical de l'approbation est d'un usage constant pour servir
l'idée. Au contraire, la thèse
adverse est traitée avec sévérité. En
relevant les champs lexicaux antagonistes du bon et du mauvais et
en étudiant leur mise en relation, vous disposerez d'un bon
moyen d'approche de ce type d'argumentation.
• l'ironie
Elle constitue l'un des moyens de la polémique
; elle est le procédé favori des philosophes
du XVIIIe siècle pour dénoncer les abus de leur
temps. Elle est une arme et à ce titre elle vise une cible,
elle déprécie l'adversaire sous couvert de son
éloge, elle amuse le lecteur par la raillerie, et elle
sollicite sa connivence.
• l'emploi d'arguments
d'autorité
L'argument d'autorité est une affirmation
présentée comme incontestable non pas
nécessairement parce qu'elle est vraie, mais parce qu'elle
émane d'une personnalité digne de foi. La citation
d'une personnalité qui fait autorité dans le domaine
en question ou proverbe, lieu commun de la sagesse populaire, ont
pour but de renforcer un argument
voire même d'entenir lieu. C'est également une
façon pour l'auteur de faire pression sur un
contradicteur.
II. Comment l'analyser ?
La parole la plus insistante ne convaincra personne si elle ne
se présente pas clairement. La clarté de
l'exposition, la progression logique des énoncés, de
l'ouverture à la conclusion, sont les qualités
premières de l'argumentation. Cet aspect est
particulièrement sensible dans les textes à
dominante littéraire et philosophique. Il s'agit donc de
repérer :
<blockquote>1. Les indices de la logique</blockquote>
Dans sa présentation, le texte argumentatif
manifeste une certaine organisation, premier indice de sa
construction logique :
• les signes typographiques constituent la marque
apparente d'une pensée claire. La division en paragraphes
souligne souvent les étapes du raisonnement.
• les connecteurs
logiques ou chronologiques permettent de souligner les
articulations de la pensée en rendant apparentes les
étapes du raisonnement: ce sont les conjonctions indiquant
la cause (en effet, parce que...) ou la conséquence (alors,
aussi, ainsi...), ou encore, les adverbes de temps (d'abord...
ensuite... enfin).
• la phrase d'ouverture, lorsque la construction est
rigoureuse, présente brièvement le thème
du texte et cet effet d'annonce fournit au lecteur une orientation
préalable des plus utiles. Une brève conclusion
reprend parfois, en fin de texte, la formule initiale et signale
que, phrase après phrase, le rédacteur vous a bien
conduit sur le lieu annoncé.
<blockquote>2. La progression du
raisonnement</blockquote>
La construction de l'argumentation obéit à
certaines règles, les unes relevant de la logique, les
autres de la rhétorique,
ou "art de persuader". Elle peut prendre diverses formes.
• le raisonnement inductif
(on part des faits particuliers pour conclure sur une
vérité générale) qui induit des
vérités abstraites sur la base d'expériences
et d'observation. Ce raisonnement par induction est celui qui
conclut à une vérité générale
induite en partant d'un fait particulier cité en exemple.
Ce type de raisonnement est considéré comme abusif
car généraliser une observation à partir d'un
cas unique ne prouve rien, mais il est souvent très
persuasif puisqu'en s'appuyant sur des exemples concrets, il donne
à l'argumentation son poids de réalité.
• le raisonnement déductif
(on part d'idées générales pour justifier une
conclusion particulière) : c'est la démarche
qui s'appuie sur des postulats qui ne sont pas ou plus à
démontrer pour déduire des conséquences.
Le raisonnement déductif est un type de construction
dans lequel chaque affirmation doit amener nécessairement
la suivante.
Ce type de raisonnement n'est utilisé que dans les
textes scientifiques et dans certains textes philosophiques ; il a
été baptisé par Aristote "syllogisme
nécessaire": il part d'une vérité
générale appelée majeure (tous les hommes
sont mortels) pour en déduire une vérité
particulière: la conclusion (Socrate est mortel)
grâce à une vérité intermédiaire
appelée mineure (Socrate est un homme). L'enthymème
(ou "syllogisme probable") est le mode de déduction que
l'on trouve dans les textes argumentatifs
littéraires : il part non de vérités
prouvées mais d'affirmations probables pour obtenir
l'adhésion car elle suggère au lecteur que la
thèse défendue est
objective.
• le raisonnement concessif
: on commence par accorder quelque crédit aux arguments ad
verses, pour défendre ensuite plus librement ses propres
arguments
• le raisonnement par analogie : on met la
réalité dont on parle en parallèle avec une
autre réalité plus concrète ou plus
connue.
• la logique du thème et du propos est le mode de
progression le plus souple. Il est bien approprié au texte
argumentatif
littéraire, car il permet à l'auteur d'agencer
l'ordre de ses arguments comme il l'en tend. Le thème
désigne ce dont on parle et ainsi se construit
progressivement la cohérence du texte. Un texte argumentatif
peut être structuré selon un aller-retour judicieux
entre les idées abstraites et les exemples
concrets.
III. Comment définir la
stratégie argumentative ?
• soit tous les arguments
et les raisonnements présentées sont en faveur de la
thèse soutenue par le
locuteur (ex : plaidoyer, apologie). Dans ce cas, la thèse
est placée en tête du raisonnement et re prise en
conclusion ;
• soit la thèse
est prise dans une controverse
dialoguée (discussion, débat). Dans ce cas,
l'exposé de la thèse
prend en compte la thèse opposée. On peut alors
:
- réfuter les arguments de la thèse
opposée en montrant qu'ils ne sont pas pertinents ou trop
faibles ;
- objecter/opposer à l'adversaire un contre-argument qui
l'invalide ou retourner l'argument
contre lui ;
- jouer la concession
(donner raison puis rejeter la thèse adverse avec plus de
vigueur) ;
- laisser sous-entendus ou implicites
certains éléments du raisonnement ;
• soit on vise à disqualifier l'adversaire,
à polémiquer. On peut alors :
- raisonner par l'absurde
en envisageant les absurdités qui s'ensuivraient si on
admettait la thèse
adverse ;
- enfermer la thèse dans un choix impossible (dilemme)
;
- utiliser l'ironie pour
feindre d'adopter l'opinion de l'autre pour mieux la
détruire en la ridiculisant;
• soit on utilise une argumentation de mauvaise foi comme
:
- la tautologie
(raisonnement en cercle vicieux) ;
- les prétextes ou fausses raisons pour se tirer d'un
mauvais pas ;
- l'argument ad hominem qui s'appuie sur la personnalité de
l'adversaire pour réfuter ses idées.
Document proposé par Stéphane
FONTAINE <sd.fontaine@wanadoo.fr>,
documenté par <Jeg>
à l'aide du Lexique
des études littéraires.
argumentatif
Document proposé par Stéphane FONTAINE
<sd.fontaine@wanadoo.fr>
NB: les définitions des mots soulignés proviennent
du Lexique des
études littéraires.
Ses fonctions :
Tout texte argumentatif
défend une prise de position en s'opposant implicitement ou
explicitement à ceux qui pensent le contraire. Si le texte
n'est pas adressé à l'adversaire lui-même, il
vise à empêcher le lecteur de prendre cet adversaire
au sérieux. Si le texte est directement adressé
à l'adversaire, il vise à réduire l'autre au
silence, sans chercher à le convaincre. Il a donc 2
fonctions dominantes :
- Fonction persuasive : lorsque l'émetteur
cherche à convaincre le lecteur, à lui faire
partager son point de vue en faisant appel à ses sentiments
(persuader) ou à sa raison (convaincre).
- Fonction polémique
: lorsque l'objectif premier de l'émetteur
est de ridiculiser celui ou ceux avec lesquels il n'est pas
d'accord.
I. "Comment ça marche
?"
<blockquote>1. S'impliquer dans son
discours</blockquote>
Le principe de l'argumentation réside dans la conviction
de son auteur qui revendique la paternité des idées
exprimées, notamment à travers :
• le système d'énonciation
On recourt fréquemment à la 1ère personne,
indice de la présence du locuteur
dans la phrase et des propos tenus. Du fait de cette
présence forte de l'auteur, le texte argumentatif
relève du discours
(qui est à l'initiative du locuteur) et non du récit
(qui est à l'initiative du narrateur).
Le locuteur peut se manifester (utilisation de la 1ère
et 2ème personne et présences de marques de
jugement) ou pas (objectivité
apparente du texte informatif/explicatif ; utilisation de la
3ème personne et des phrases déclaratives) pour
masquer l'intention de convaincre Le présent intemporel est
le temps habituel du texte argumentatif,
puisque l'argument est valable de façon
générale.
• le choix du lexique comme
indicateur du degré de certitude :
- l'affirmation catégorique, certifiant qu'il n'y a pas
de doute possible. Sont alors employés des termes comme
"assurément", "sans aucun doute", "il est certain que",
"toujours", "jamais"...
- l'hésitation qui cherche ou semble chercher à ne
pas contraindre le lecteur. Sont alors employés des termes
comme "peut-être", "il est possible que",..
En argumentant, le locuteur
affirme sa certitude d'être dans le vrai ; il use
d'expression qui traduisent son assurance, sa confiance dans ses
idées comme "sans doute", "évidemment", "il est
indubitable que", etc.… La conviction d'avoir raison
s'affiche également dans les verbes d'obligation. Toutes
ces marques d'un jugement personnel sont appelées modalisations.
- l'utilisation d'un lexique affectif
par lequel le locuteur cherche à capter la sympathie ou
l'estime de son public et essaie de communiquer de lui l'image
morale la plus positive ou de présenter son dessein comme
particulièrement louable. Il utilise pour cela un réseau
de termes propres à manifester son émotion, sa
sincérité et son attachement à la thèse
exposée.
- les connotations qui
indiquent un jugement de valeur : connotations positives pour le
point de vue défendu ; négatives pour le point de
vue refusé.
<blockquote>2. S'adapter au destinataire</blockquote>
Le souci de l'effet à produire est très fort dans
le discours argumentatif,
puisque l'auteur cherche à convaincre, il doit
connaître son destinataire
et disposer son argumentation
en fonction de ce qu'il sait de son caractère. L'adaptation
calculée du langage à l'auditeur relève
parfois de la manipulation. C'est le cas lorsque les propos ne
sont adaptés aux attentes du destinataire
que pour tromper celui-ci.
• en préparant l'auditoire
Dans certains discours argumentatifs,
l'auteur commence par une entrée en matière
brève et percu tante, l'exorde,
propre à capter l'attention du destinataire
et à lui inspirer de la bienveillance. Souvent, ce type de
texte se conclut par une péroraison,
résumé des principaux arguments et appel aux
sentiments.
• en choisissant des arguments adaptés
Le choix de la méthode d'approche et celui des arguments
dépendra de l'esprit et des sentiments du destinataire
à convaincre. Pour plaire et raisonner en suscitant
l'intérêt du lecteur par l'exposition de la
pensée en cherchant des appuis incontestables en utilisant
:
- la métaphore.
Plus qu'un ornement, elle est un véritable outil de
persuasion qui transfère l'énoncé
abstrait dans un registre imagé et accepté du
lecteur, en rapprochant des faits qui ne résistent pas
toujours à l'analyse ;
- l'exemple qui introduit un
fragment de récit dans un
discours abstrait et aide
à la compréhension en fournissant une mise en
scène de l'idée et peut avoir valeur de preuve. Ils
ont pour fonction de soutenir une opinion, une
vérité d'ordre intellectuel de manière
concrète plus facile à saisir ; il appuie
l'argument logique comme une
illustration.
- le récit qui concourt
à l'agrément des propos en prêtant à
l'argument une
crédibilité supplémentaire en le montrant
à l'œuvre dans une histoire vivante dotée d'un
statut de réalité.
• en faisant découvrir la vérité
La meilleure façon de toucher le destinataire
de l'argumentation est de le faire participer à la
découverte de la vérité dont on veut le
convaincre. Cette méthode prend en compte l'amour-propre de
l'interlocuteur, amené à durcir ses positions
dès lors qu'on les récuse. Elle permet d'obtenir un
changement d'opinion de l'interlocuteur, mais en faisant mine de
lui en laisser l'initiative.
Il privilégiera une énonciation
qui évite la neutralité de l'expression ordinaire et
qui utilise un style oratoire
:
- l'anaphore
(répétition à intervalles réguliers
d'un terme ou d'une construction) qui provoque un leitmotiv
sémantique ou sonore
pour attirer l'attention sur une notion essentielle ;
- la période (phrase
longue et rythmée par des pauses secondaires) qui donne au
discours un rythme et une
ampleur qui traduisent le force de conviction du locuteur ;
- l'antithèse
(rapprochement de termes de sens opposés) qui indique la
tonalité polémique
au travers, souvent, de 2 champs
lexicaux opposés pour valoriser sa thèse
et celle qui discrédite pour renforcer l'opinion du
locuteur par effet de
contraste
- le temps des verbes typiques du discours, dépourvu de
valeurs temporelle.
<blockquote>3. Réfuter
l'adversaire</blockquote>
Vouloir persuader de la vérité de son discours,
c'est souvent du même coup contester le discours d'un autre
: le texte argumentatif
revêt alors la forme d'un affrontement de thèses.
Dans un texte argumentatif
à caractère littéraire, cet affrontement est
rarement une réfutation
au sens strict : l'auteur ne cherche pas à prouver la
fausseté de la thèse adverse (comme le ferait une
réfutation philosophique), il se contente de la
présenter sous le jour le plus défavorable, voire de
la ridiculiser (l'argumentation est polémique,
du grec polemos, la guerre). Plusieurs moyens sont à sa
disposition :
• l'énonciation à plusieurs
Deux voix se font entendre dans le texte à
caractère polémique,
celle de l'auteur et celle de l'adversaire. Vous devez observer
chaque fois comment la parole est concédée à
ce dernier, comment son
discours est rapporté afin de ne pas attribuer à
l'un la pensée de l'autre.
• une présentation partiale des thèses
en présence
La thèse de l'auteur
est exposée avec faveur à travers un réseau
lexical valorisant : épithètes louangeuses,
superlatifs, substantifs et verbes à connotations
positives. Le champ
lexical de l'approbation est d'un usage constant pour servir
l'idée. Au contraire, la thèse
adverse est traitée avec sévérité. En
relevant les champs lexicaux antagonistes du bon et du mauvais et
en étudiant leur mise en relation, vous disposerez d'un bon
moyen d'approche de ce type d'argumentation.
• l'ironie
Elle constitue l'un des moyens de la polémique
; elle est le procédé favori des philosophes
du XVIIIe siècle pour dénoncer les abus de leur
temps. Elle est une arme et à ce titre elle vise une cible,
elle déprécie l'adversaire sous couvert de son
éloge, elle amuse le lecteur par la raillerie, et elle
sollicite sa connivence.
• l'emploi d'arguments
d'autorité
L'argument d'autorité est une affirmation
présentée comme incontestable non pas
nécessairement parce qu'elle est vraie, mais parce qu'elle
émane d'une personnalité digne de foi. La citation
d'une personnalité qui fait autorité dans le domaine
en question ou proverbe, lieu commun de la sagesse populaire, ont
pour but de renforcer un argument
voire même d'entenir lieu. C'est également une
façon pour l'auteur de faire pression sur un
contradicteur.
II. Comment l'analyser ?
La parole la plus insistante ne convaincra personne si elle ne
se présente pas clairement. La clarté de
l'exposition, la progression logique des énoncés, de
l'ouverture à la conclusion, sont les qualités
premières de l'argumentation. Cet aspect est
particulièrement sensible dans les textes à
dominante littéraire et philosophique. Il s'agit donc de
repérer :
<blockquote>1. Les indices de la logique</blockquote>
Dans sa présentation, le texte argumentatif
manifeste une certaine organisation, premier indice de sa
construction logique :
• les signes typographiques constituent la marque
apparente d'une pensée claire. La division en paragraphes
souligne souvent les étapes du raisonnement.
• les connecteurs
logiques ou chronologiques permettent de souligner les
articulations de la pensée en rendant apparentes les
étapes du raisonnement: ce sont les conjonctions indiquant
la cause (en effet, parce que...) ou la conséquence (alors,
aussi, ainsi...), ou encore, les adverbes de temps (d'abord...
ensuite... enfin).
• la phrase d'ouverture, lorsque la construction est
rigoureuse, présente brièvement le thème
du texte et cet effet d'annonce fournit au lecteur une orientation
préalable des plus utiles. Une brève conclusion
reprend parfois, en fin de texte, la formule initiale et signale
que, phrase après phrase, le rédacteur vous a bien
conduit sur le lieu annoncé.
<blockquote>2. La progression du
raisonnement</blockquote>
La construction de l'argumentation obéit à
certaines règles, les unes relevant de la logique, les
autres de la rhétorique,
ou "art de persuader". Elle peut prendre diverses formes.
• le raisonnement inductif
(on part des faits particuliers pour conclure sur une
vérité générale) qui induit des
vérités abstraites sur la base d'expériences
et d'observation. Ce raisonnement par induction est celui qui
conclut à une vérité générale
induite en partant d'un fait particulier cité en exemple.
Ce type de raisonnement est considéré comme abusif
car généraliser une observation à partir d'un
cas unique ne prouve rien, mais il est souvent très
persuasif puisqu'en s'appuyant sur des exemples concrets, il donne
à l'argumentation son poids de réalité.
• le raisonnement déductif
(on part d'idées générales pour justifier une
conclusion particulière) : c'est la démarche
qui s'appuie sur des postulats qui ne sont pas ou plus à
démontrer pour déduire des conséquences.
Le raisonnement déductif est un type de construction
dans lequel chaque affirmation doit amener nécessairement
la suivante.
Ce type de raisonnement n'est utilisé que dans les
textes scientifiques et dans certains textes philosophiques ; il a
été baptisé par Aristote "syllogisme
nécessaire": il part d'une vérité
générale appelée majeure (tous les hommes
sont mortels) pour en déduire une vérité
particulière: la conclusion (Socrate est mortel)
grâce à une vérité intermédiaire
appelée mineure (Socrate est un homme). L'enthymème
(ou "syllogisme probable") est le mode de déduction que
l'on trouve dans les textes argumentatifs
littéraires : il part non de vérités
prouvées mais d'affirmations probables pour obtenir
l'adhésion car elle suggère au lecteur que la
thèse défendue est
objective.
• le raisonnement concessif
: on commence par accorder quelque crédit aux arguments ad
verses, pour défendre ensuite plus librement ses propres
arguments
• le raisonnement par analogie : on met la
réalité dont on parle en parallèle avec une
autre réalité plus concrète ou plus
connue.
• la logique du thème et du propos est le mode de
progression le plus souple. Il est bien approprié au texte
argumentatif
littéraire, car il permet à l'auteur d'agencer
l'ordre de ses arguments comme il l'en tend. Le thème
désigne ce dont on parle et ainsi se construit
progressivement la cohérence du texte. Un texte argumentatif
peut être structuré selon un aller-retour judicieux
entre les idées abstraites et les exemples
concrets.
III. Comment définir la
stratégie argumentative ?
• soit tous les arguments
et les raisonnements présentées sont en faveur de la
thèse soutenue par le
locuteur (ex : plaidoyer, apologie). Dans ce cas, la thèse
est placée en tête du raisonnement et re prise en
conclusion ;
• soit la thèse
est prise dans une controverse
dialoguée (discussion, débat). Dans ce cas,
l'exposé de la thèse
prend en compte la thèse opposée. On peut alors
:
- réfuter les arguments de la thèse
opposée en montrant qu'ils ne sont pas pertinents ou trop
faibles ;
- objecter/opposer à l'adversaire un contre-argument qui
l'invalide ou retourner l'argument
contre lui ;
- jouer la concession
(donner raison puis rejeter la thèse adverse avec plus de
vigueur) ;
- laisser sous-entendus ou implicites
certains éléments du raisonnement ;
• soit on vise à disqualifier l'adversaire,
à polémiquer. On peut alors :
- raisonner par l'absurde
en envisageant les absurdités qui s'ensuivraient si on
admettait la thèse
adverse ;
- enfermer la thèse dans un choix impossible (dilemme)
;
- utiliser l'ironie pour
feindre d'adopter l'opinion de l'autre pour mieux la
détruire en la ridiculisant;
• soit on utilise une argumentation de mauvaise foi comme
:
- la tautologie
(raisonnement en cercle vicieux) ;
- les prétextes ou fausses raisons pour se tirer d'un
mauvais pas ;
- l'argument ad hominem qui s'appuie sur la personnalité de
l'adversaire pour réfuter ses idées.
Document proposé par Stéphane
FONTAINE <sd.fontaine@wanadoo.fr>,
documenté par <Jeg>
à l'aide du Lexique
des études littéraires.